Quand la télévision partait pour la Grande guerre


J. GREGOIRE, Quand la télévision partait pour la Grande guerre (Colloque international Liège août 1914 nonante ans plus tard de Liège, 6 et 7 mai 2004)

Première série historique au long cours de l’age d’or d’une télévision mature, 1914-1918. Le Journal de la Grande guerre est aussi mythique pour la Belgique qu’était La Caméra explore le temps pour la France. Elle est l’école d’une génération de journaliste aujourd’hui disparue des écrans, elle montre qu’il est possible de produire une très grande diversité de programmes dans une série « franchisée » et est à la source de « l’école belge du documentaire historique télévisé» (montage compilant images animées, photos, interviews de spécialistes ou de témoins souvent in situ ; sujets belges et contemporains ; outrance dans l’usage de l’anniversaire prétexte  ; création du triptyque journaliste – réalisateur – historien référent ; indépendance très marquée des équipes ; improvisation systématique mais souvent géniale). Lancé par Georges Van Hout, transcendé par Henri Mordant et Alexandre Keresztessy, le programme sans équivalent à l’exception des 26 épisodes de La Grande guerre de la BBC, va réunir plus ou moins régulièrement autour du noyau de départ à peu près tout ce que la télévision compte de réalisateurs et de journalistes, de plus en plus assistés à partir de 1966 par des historiens issus essentiellement de l’Ecole royale militaire et de l’ULB. Largement improvisée, la série va fortement évoluer dans son rythme, ses sources, ses moyens et ses méthodes en s’adaptant à la chronologie du conflit. Hebdomadaire en 1964, elle rend compte fort logiquement des nombreux faits des premiers mois du conflit, mais le manque d’événements d’une guerre figée en Europe doublé par le surmenage de la seule équipe de réalisation, l’oblige à prendre un rythme bimensuel en janvier 1965. La première année, les archives trouvées dans les collections des grands centres d’histoire militaire sont complétées par le saucissonnage de La Grande guerre achetée à la BBC. Dès 1965, raréfaction des images et manque d’argent obligent l’équipe à recourir systématiquement à l’interviews de témoins, la reconstitution in situ et la mises en situation. En1966-1967, l’ampleur du travail est reconnue par une augmentation des moyens qui permet la prospection systématique des musées et archives étrangères notamment en Europe orientale, l’analyse systématique de la littérature historique et la réalisation de nouveaux interviews pour se « prémunir de la mort du témoin ». Le projet bénéficie de circonstances favorables à son développement. La télévision belge de ces années est ouverte aux nouveautés parfois les plus folles. Les dates symboliques simplifient la lecture des évènements. On perçoit l’urgence de préserver le souvenir du conflit car l’âge de plus en plus avancé des survivants ne permettra plus longtemps de le célébrer autrement que comme un épisode d’une histoire définitivement passée sans témoin vivant. Simplicité politique du conflit qui le rend attrayant pour la télévision. Existence d’archives filmée de plus en plus nombreuses. Plus grande facilité de parler d’une guerre plus consensuelle que la suivante car ne comportant que peu d’épisodes potentiellement polémiques, à l’exception des « fusillés pour l’exemple » pour la France et du « frontisme / Conseil des Flandres » pour la Belgique. Le temps qui passe exclu l’influence politique des derniers poilus tout en atténuant les mauvais souvenirs. Mère spirituelle de Jours de guerre, Son souvenir est tellement prégnant qu’il va même parfois jusqu’à gommer toutes productions antérieures en devenant le symbole du début de l’histoire à la RTB et son aspect marathonien minimise fortement, même chez des journalistes fort impliqués dans la production historique contemporaine, l’extrême richesse historique et la grande production postérieure de la RTB, qui ne trouve pas sa place dans les séries ambitieuses comme le sera Jours de Guerre.  


Attention, le contenu de ces textes représente la situation au moment de la redaction.



Table des matières

Introduction >>
Le contexte favorable >>
Les origines de la série 14-18.Le Journal de la Grande guerre >>
Sources, archives et méthode Mordant : la mise en situation >>
L’accueil et l’audience >>
La presse et le public : entre polémique et histoire fédératrice >>
Sensibilité historique du critique de télévision, sensibilité politique du journal >>
  Polémiques : La flamandisation de l’université de Gand, activisme et frontisme : l’actualité entre par la fenêtre (1966-1968) >>
  Polémiques : Le Roi Albert : sensibilité exacerbée (1965) >>
  Polémiques : Les Pâques sanglantes : l’actualité frappe à la porte (1966) >>
  Polémiques : La Révolution d’octobre : la forme plutôt que la politique (1967) >>
  Polémiques : Cloche merle dans une ville martyre : le sommet de l’insignifiance (1967) >>
  L’histoire fédératrice : La résistance à l’occupant, l’aviation, la vie du soldat (1965) >>
  L’histoire fédératrice : Un pays autour d’un deuil : la Reine Elisabeth (1965) >>
Jeunesse, source de toutes les attentions >>
France – Belgique : deux choix de programmation :  >>
L’influence de l’historiographie française en Belgique >>
  Verdun RTB – Verdun ORTF >>
  Histoire télévisée française, histoire télévisée belge >>
La postérité du Journal de la Grande guerre >>
  Le souvenir du Journal de la Grande guerre >>
  La prise de conscience d’une particularité historiographique >>
Conclusions >>
  Le regard de la télévision >>
  L’histoire à la RTB >>
  Historiographie générale >>
  La forme et les gens >>

 


 

1) Introduction

En 1964, à l’occasion du cinquantième anniversaire du début de la première guerre, la RTB se lance dans une aventure inédite : la production et la diffusion bimensuelle d’un panorama élaboré du conflit, compilant archives, mise en scène et interviews.

Symbole du meilleur de la télévision belge des années 60, le Journal de la Grande guerre est aussi mythique pour la Belgique qu’est La Caméra explore le temps pour la France. C’est d’abord la première série historique élaborée au long cours (126 épisodes et un débat final – 118 épisodes selon Mordant), produit et expression d’une télévision enfin mature. Elle montre qu’il est possible de produire, avec peu de moyens, une très grande diversité de programmes dans une série « franchisée ».

C’est aussi le terrain d’entraînement d’une génération de jeunes journalistes et réalisateurs, aujourd’hui disparus des écrans, qui appliquent à l’histoire, avec une inventivité innocente, les méthodes du reportage d’actualités. Elle est à la source de ce qu’on peu appeler « l’école belge du documentaire historique télévisé ».

C’est enfin un souvenir glorieux et un modèle de référence qui rend possible la réalisation d’autres projets aussi ambitieux (comme 1830, Chronique imaginaire d’une révolution en 1980 et surtout Jours de guerre en 1989-1995).  

Par contre, son souvenir est tellement prégnant qu’il va occulter toutes productions antérieures en devenant le symbole du début de l’histoire à la RTB, ce qui est faux. Son aspect marathonien, minimise également l’extrême richesse des programmes ultérieurs qui ne trouvent pas leur place dans des séries ambitieuses, comme Jours de guerre, sa fille spirituelle.


2) Le Contexte favorable
 

En plus de ses nombreuses qualités, le Journal de la grande guerre bénéficie de circonstances favorables à son développement qui expliquent sans doute que l’expérience a pu se poursuivre au delà d’une quinzaine d’épisodes.

D’abord, 1964 est une année exceptionnelle, qui voit le nombre de programmes historiques sur les télévisions francophones augmenter de près de 50% [1] . La magie des chiffres ronds et le goût des récits aisés, servent des émissions anniversaires souvent symboliques par les mythes, sinon par les épopées qu’elles véhiculent. Les dates symboliques simplifient également la lecture des évènements. 

La télévision belge de ces années est ouverte aux nouveautés parfois les plus folles. Elle mène une politique de programmation volontariste. Elle propose de front, émissions isolées et séries. Si les premières sont habituelles et faciles à réaliser, les secondes témoignent d’une télévision mature qui recherche une certaine reconnaissance par des programmes de prestige. Elle s’accorde pour cela les moyens de la régularité et dispose du personnel doué nécessaire. Notons que cela ne l’empêche pas d’acheter également des programmes à l’étranger, traditionnellement à la RTF, mais aussi souvent aux télévisions britannique et américaine.

Ensuite, le cinquantième anniversaire du début de la première guerre est sans aucun doute un moment fort mais définitif. On perçoit l’urgence de préserver le souvenir du conflit car l’âge de plus en plus avancé des survivants ne permettra plus longtemps de le célébrer autrement que comme un épisode d’une histoire définitivement passée sans témoin vivant. Même si les anciens sont plus nombreux et en meilleure santé, le même phénomène se renouvelle en 1989-1995 pour le cinquantième anniversaire du conflit suivant.

Enfin, il est également plus facile de parler de la première guerre que la seconde [2] . Son éloignement exclut l’influence politique des derniers poilus, atténue les mauvais souvenirs et permet d’exalter facilement le sacrifice des soldats, surtout quand il aboutit à la victoire. Le peu de polémique [3] d’une guerre plus consensuelle que la suivante facilite donc son évocation d’autant que la simplicité politique et stratégique du conflit le rend attrayant pour la télévision [4] .  


3) Les Origines de la série

Le Journal de la grande guerre veut, à cinquante ans de distance, raconter le conflit, sous la forme d’un magazine d’actualité de type Neuf millions en s’en tenant aussi rigoureusement que possible au respect de la chronologie.

La presse qui met pourtant en doute la capacité de la RTB à arriver au bout de l’aventure, souligne dès le début son caractère singulier. En effet, le seul programme approchant en 1964 est La Grande guerre, une série en 26 épisodes de la BBC. Par contre, les programmes isolés sont plus nombreux comme 14-18. Nuit sur l’Europe de Jean Aurel et Jacques Laurent à destination du cinéma rapidement repris par la télévision, Nouvelles du front occidental (4/8/64) de la RTF et Cinquante ans après (4/8/64) de la RTB. La télévision belge reprend également en direct les commémorations d’octobre 1964 : une Messe à l’occasion du 50ème anniversaire des événements de 1914  depuis la Cathédrale Saint-Michel de Bruxelles et la Manifestation nationale en hommage au Roi Albert et aux anciens combattants.

Les magazines de télévision attribuent l’émission à Georges Van Hout et à Henri Mordant, ce qui n’est pas faux mais très incomplet.

Au printemps 1964, le premier propose au service Enquête et reportage, le concept et les premiers scénarios. Son idée est originale. Il s’agit d’entreprendre un vaste travail historique sur la guerre, de dépasser le stade habituel de l’information préalable à une émission et de rassembler une documentation la plus exhaustive possible.

Le principe est accepté par la Direction générale car la RTB n’avait pas prévu d’émissions aussi ambitieuses sur la première guerre. Il se peut d’ailleurs fort bien que, sans son initiative, la chaîne ait diffusé comme tout le monde le programme de la BBC.

Elle en confie l’exécution à Henri Mordant bombardé pour l’occasion producteur – présentateur. Le choix est loin d’être innocent car il est à ce moment l’étoile montante de la chaîne. Se met alors en place une structure élaborée de production : Georges Van Hout rédige un canevas, deux documentalistes dont Jacques Bredael recherchent les informations et alimentent Georges Van Hout en idées, Alexandre Keresztessy réalise l’émission qui est présentée par Henri Mordant.

Bien que par modestie, oubli ou fierté, les protagonistes sont discrets sur le sujet, on ne peut passer sous silence l’importance de Jacques Bredael et son arrivée étonnante dans l’aventure. Professeur de morale et de français à l’Athénée Adolphe Max de Bruxelles. Il a comme préfet Georges Van Hout qui l’engage, plus ou moins volontairement, pour la recherche de la documentation et pour la rédaction d’une bonne partie des scénarios. Il va continuer après le départ de son mentor, prendre une place de plus en plus importante dans 14-18 et faire à la RTB la carrière qu’on connaît.

A partir de 1965 vont s’agglomérer, autour du noyau Mordant – Keresztessy – Bredael parfois usé, des hommes nouveaux comme Robert Dethier, René Thierry, David Lachterman, Paul Collaer, Willy Estersohn, Raoul Goulard, Jean-Marie Delmée, Pierre Manuel, Michel Franssen, Alain Nayaert, David Lachterman, Michel Stameschkine, Daniel Vos, Jacques Cogniaux, André Podolski et Willy Estersohn.

Faisant parfois leurs premières armes dans la série ou venus de Neuf millions, leur passage est souvent l’occasion de se révéler au public. Dès les premiers mois on trouve dans la presse à leur sujet des commentaires enthousiastes. Ces futures vedettes qui seront la RTB des années 70-80, gardent eux aussi un bon souvenir de la série au point qu’on trouve parfois dans leur curriculum « à fait une belle guerre de 14-18 ».

Ponctuellement au début puis systématiquement à partir de 1966, se constitue un noyau de conseillers composé d’historiens spécialistes de l’histoire contemporaine venant essentiellement de l’ULB comme Jean Stengers, Georges Goriely, Jacques Willequet et le jeune José Gotovitch (programmes sur l’activisme et le mouvement flamand) ou de l’Ecole Royale Militaire comme Henri Bernard et Jean-Léon Charles.

Hebdomadaire en 1964, 14-18 suit fort logiquement les nombreux faits des premiers mois de la guerre. Mais le manque d’événements d’une guerre figée en Europe et le surmenage de la seule équipe de réalisation, oblige à l’adoption d’un rythme bimensuel à partir de janvier 1965. Cette formule dure jusqu’à la fin de la série à l’exception d’une demi-douzaine de programmes hebdomadaires correspondants aux offensives d’août à novembre 1918.

Au moment où la série change de visage, Georges Van Hout se retire. Il est remplacé par un nombre variable d’équipes « journaliste (rédacteur du scénario), documentaliste, réalisateur (chargé de l’émission) ». Loin d’être insignifiant, ce départ est l'aboutissement d’un conflit entre scénariste-documentaliste et journaliste-présentateur, soit plus personnellement entre Georges Van Hout et Henri Mordant. Le journaliste se sent trop à l’étroit dans des scénarios trop précis, trop explicites, trop construits déjà sur le plan dramaturgique qui le relègue au rang de comédien potiche.

Le nouveau rythme, présente pour les auteurs quelques avantages qu’ils vont exploiter à fond : aucune formule fixe, construction de chaque numéro indépendante des autres, émission magazine pouvant succéder à une émission exclusivement thématique, étude d’événements moins nombreux mais se déroulant sur une longue période, traitement plus à fond les sujets intemporels, possibilité de créer des programmes rétrospectifs ou d’émissions thématiques sur la vie quotidienne. Même si l’équipe revendique encore « l’obligation de traiter les grands sujets, les événements quand la chronologie l’impose », seul un Journal parlé sur la situation militaire, compense de temps en temps une approche essentiellement thématique.

On peut se demander si les auteurs, le nez sur le travail, étaient conscients de la métamorphose qu’ils apportaient de la dramaturgie de l’émission. Au contraire de ce qu’on a pu croire jusqu’ici, ce changement n’a pas été improvisé. Dès juillet 1964 dans une longue interview au Moustique, Henri Mordant explique très clairement, avant que la moindre image ne soit diffusée, la nécessité certaine d’abandonner à un moment la chronologie pour l’étude thématique du conflit : «  Une émission qui dure quatre ans. Est-ce qu’on va pouvoir tenir ? Est-ce qu’on ne va pas être emmerdant. Ce qu’on veut raconter au cours de ces émissions, ce n’est pas seulement la guerre mais aussi la vie en Europe, en Turquie, en Amérique pendant ces quatre années. Et si une semaine il ne se passait rien sur le front, eh bien il y avait quand même la saison à Deauville, un scandale <…> Au début évidemment, c’est fou ce qui se passe <…> c’est une époque où les évènements sont innombrables et se bousculent. Et nous avons la plus grande peine à les sérier, à les raconter. Mais dès que le front va se stabiliser, nous pourrons revenir en arrière »

L’hypothèse d’Henri Mordant se révèle exacte. Ce sont les émissions thématiques qui vont le plus marquer les spectateurs et qui donneront au programme son prestige en le différenciant des traditionnels montages. Grâce à la durée, ils ont pu trouver une sorte de continuité historique et traiter à fond des sujets non évènementiels.


4) Sources, archives et méthode Mordant : la mise en situation

Pratiquement dès l’acceptation du projet, Jacques Bredael recherche dans la presse écrite de 1913-1914 des éléments qui sont immédiatement scénarisés. De l’aveu même des auteurs de la série, c’est le manque de temps qui les poussent à utiliser au départ « tout ce qui leur tombe sous la main » : livres, revues et journaux sortis en librairie, photographies, archives filmées et films de fiction.

Les archives photographiques (très nombreuses) et filmées (plus rares) sont compilées à partir des collections du Musée royal de l’armée, du Service Cinématographique de l'Armée française (SCA) et de l’Imperial War Museum. Ces documents sont complétés pour les premiers mois de la guerre par l’achat des droits de diffusion de La Grande guerre de la BBC, qui ne sera pas diffusée telle quelle mais allégrement saucissonnée.

Dès 1965, raréfaction des évènements aidant, l’équipe se trouve en panne d’archives. La carence d’images doit être palliée par des techniques de narration originale : interviews de témoins et acteurs des évènements ; usage des maquettes, dessins, cartes, objets et trucages ; reconstitutions fauchées et des mises en situation de journalistes dont la plus célèbre est celle de la Crète des Eparges [5] par Henri Mordant, certainement inspiré par une émission américaine de 1964 sur la Bataille des Ardennes.

En 1966, le Journal de la grande guerre devient une véritable institution. Pourtant, les carences de ses moyens sont criantes : impossibilité d’accéder aux archives filmées et photographiques éloignées, coût élevé des copies et des droits de diffusion surtout pour les collections privées, manque de temps pour prospecter la littérature spécialisée ou pour utiliser à fond les ouvrages qu’ils possèdent, manque de temps pour appliquer les méthodes rigoureuses de la critique historique, manque de contact auprès des anciens combattants étrangers, impossibilité de les interviewer, disparition rapide des témoins.

Fin 1966, l’importance du travail est enfin reconnue par la Direction de la chaîne qui augmente les moyens attribués à l’émission. Ils lui permettent la prospection systématique des musées et archives étrangères, prospection systématique des musées et archives étrangères notamment en Europe orientale (Tchécoslovaquie, Pologne, Roumanie, Hongrie, Bulgarie, RDA), l’analyse systématique de la littérature historique, établissement d’interviews audio plus rapides et moins coûteuses qui permettent de déterminer si le tournage est nécessaire, la réalisation de nouveaux interviews pour se « prémunir de la mort du témoin ».

Ce dernier point est sans doute l’une des plus grande réussite du Journal de la grande guerre. Il a sauvegardé approximativement 250 témoignages sur l’histoire de la Première guerre, particulièrement en Belgique. Selon Alain Nayaert trente ans après, ils sont utiles « en raison de leur charge émotionnelle ou de la contribution qu’ils apportent à l’étude historique de la Grande guerre ». S’y côtoient des inconnus, ou qui le sont devenus par manque d’information, des futures personnalités et l’un ou l’autre rare dignitaire du temps survivant encore lors de la réalisation du programme (Camille Huysmans, Maurice Genevoix, Damia, Françoise Rosay, Lieutenant Brandis, Pierre Mac Orlan, Philippe Soupault, Marcel Thiry, l’Archiduc Otto de Habsbourg ou Alexandre Kerenski, chef du gouvernement provisoire russe).

On assiste aussi ici à la création d’un véritable pool historique efficace et organisé tel que celui de la BBC. Malheureusement, comme ce sera le cas pour celui créé plus tard autour de Jours de guerre, il ne sera pas exploité après la clôture de la série à la hauteur de ses capacités. Jusqu’en 1989, il n’y a plus d’équipe histoire réellement structurée à la RTB, même si des individualités brillantes reprennent la tâche

Revenons à la forme du programme. Aujourd’hui louée, les trouvailles imaginatives des journalistes pour varier la présentation et qui leurs laissera souvent de bon souvenirs ne plait pas toujours en 1966. Souvent ces commentaires qui portent sur la forme nous semblent vains mais il montrent le rapport passionnel que les journalistes chroniqueurs, censé représenter leurs lecteurs, entretiennent avec la télévision. On reproche surtout aux auteurs d’abuser des reconstitutions ou de mise en situation et de ne pas hésiter à faire passer pour des documents d’archives, des films de fiction.

Si placé du côté de la télévision on comprend très bien ces arguments qui font la place belle au spectacle, la méthode suscite quelques gênes du côté des historiens à l’image d’une anecdote racontée par Jean Stengers longtemps après : « Le hasard a fait que j’ai assisté au montage d’une émission consacrée à la révolte irlandaise de 1916. Un des traits frappants de ces Pâques sanglantes est le fait que l’insurrection a été totalement inattendue : il ne s’est trouvé personne, dans ces conditions pour la filmer. Mais le journaliste qui s’occupait de l’émission disposait d’un film de fiction. Il en a, sans hésitation, tiré quelques séquences bien frappantes. Je n’ai pas protesté. Je n’avais aucune qualité pour jouer au censeur, mais intérieurement, comme historien, je me sentais malmené. L’histoire était trahie puisqu’une des caractéristiques du Dublin de 1916 était précisément de ne pas avoir été filmé ».

On rencontre ces arguments tout au long du travail jusque dans la bouche de réalisateurs de Jours de guerre interrogés en 1998. L’historien est souvent confronté à la question schizophrénique Qui doit avoir le dernier mot dans la réalisation d’une émission historique à la télévision : l’historien et la rigueur de sa méthode ou le réalisateur qui doit faire un spectacle qui plait


5) Accueil et audience

On peut rapidement survoler l’évolution de l’accueil et de l’audience du Journal de la grande guerre

1964

Au départ en tout cas, le spectateur est au rendez-vous. C’est l’un des succès de l’année à la RTB. Son retentissement est considérable. Son audience a souvent dépassé celle du journal télévisé [6] .

L’accueil aux programmes est évolutif. Enthousiaste au début en raison du one man show d’Henri Mordant et des « faits ignorés ou perdus dans l’oubli » expliqués par l’équipe, la lassitude s’installe peu à peu. Le rythme bimensuel, évidemment moins lassant, sauve le projet qui devient nettement plus thématique.

Face à cette émission, les programmes sur la deuxième guerre mondiale qui, à l’exception des rappels de la Bataille des Ardennes lui sont antérieurs, font presque pâle figure même si la RTB ne manque ni le débarquement, ni la libération du pays, ni l’offensive de décembre 1944 [7] .

1965

Au premier anniversaire de 14-18. Journal de la Grande guerre, la lassitude du public et des chroniqueurs est très nette. Si l’on en croit les « sondages maison », 14-18 bénéficie toujours d’un indice de satisfaction élevé avec pourtant  une audience en fléchissement.

 

Mais on doit modérer l’importance donnée à ce fléchissement. Si la tendance générale est à la baisse, le programme tourne toujours autour des 40% d’audience sans grande concurrence il est vrai. Par contre l’indice de satisfaction reste élevé autour des 80% tout en sachant que cette donnée est difficilement utilisable car les mécontents ferment leur poste ou quand c’est possible vont voir ailleurs. En fait, s’il y a bien fléchissement d’écoute correspondant à la stagnation des opérations militaires fin 1914, la réforme des programmes vers des sujets plus thématiques suscitent quelques mois un nouvel intérêt. Puis, la chute reprend en été-automne 1965 pour atteindre le point le plus bas en novembre, mois du programme spécial sur la Reine Elisabeth. Est-ce par l’exceptionnelle réussite de celui-ci qui correspond à la mort de la souveraine ou plus prosaïquement grâce à la présence régulière d’un excellent René Thierry, mais l’audience fait rapidement un bond en avant pour se stabiliser pendant plus d’un an.

1966

Le Journal de la Grande guerre ne suscite plus guère d’articles courroucés. Il est vrai que le public, comme les auteurs s’installent dans une longue guerre où les occasions d’indignation sont rares.

1967

Dans sa troisième année, Le Journal de la Grande guerre continue sur le rythme pris début 1965 mais avec des hauts et les bas. La presse est toujours partagée entre lassitude et intérêt renouvelé par des programmes aux sujets d’importance variables ou par le talent de quelques journalistes.

Tous les chroniqueurs sont à la fois lassés par les épisodes plus banals et passionnés par les sujets exceptionnels, scandaleux ou spectaculaires. C’est d’ailleurs le lot des longs programmes de ce genre.

On commence en 1967 à percevoir la singularité du programme et le talent des réalisateurs: « Loin de nous cependant l’intention de minimiser leur mérites car ils s’étaient lancés dans l’aventure avec un optimisme fougueux, contant ainsi chaque semaine et en image, ceux-là même qui leur criaient casse coup. Au bout d’un certain temps bien sûr, la fatigue se fit sentir, aussi force leur fut de ralentir rapidement le rythme initial de leur production pour tenir le coup. Et bientôt depuis trois ans, en effet, contre toute attente, ils tiennent le coup. Résistant sans doute des quatre fers pour ne point céder à la lassitude, la télévision belge nous offre là, reconnaissons-le, un bel exemple de persévérance » [8] .

1968

A l’approche de la fin, les chroniqueurs oublient leurs principales critiques en se rendant compte que l’émission va certainement leur manquer « tant sa régulière et suffisante qualité fait à présent partie de notre existence TV » [9] . Si certains plaisantent (« En novembre prochain, j’imagine que la RTB pavoisera et organisera, devant les caméras, le défilé triomphal des auteurs et présentateurs » [10] ), d’autres reconnaissent que Le Journal de la Grande guerre avait révélé une guerre et une époque que la plupart d’entre eux et paradoxalement tous les présentateurs ne connaissent que par ouï-dire ou de façon livresque.

La série ne se termine pas le 11 novembre 1968, qui ne donne même pas lieu à une émission spéciale, mais se prolonge jusqu’à la fin du mois de décembre tant est grande la volonté de ses auteurs de parler des premières semaine de l’après-guerre.

Par contre, le débat final est unanimement rejeté car trop bavard et interminable. On se demande d’ailleurs à la lecture des journaux, quel fut l’intérêt de celui-ci, ci ce n’est de réunir une dernière fois dans une ambiance amicale, les protagonistes d’une série commencée sur une télévision pionnière et terminée sur un média en pleine possession de sa technique et de sa légitimité.


6) La presse et le public : entre polémique et histoire fédératrice

Pour une émission aussi longue, on pouvait s’attendre à de nombreux scandales, réactions ou polémique. Mais paradoxalement, ce n’est pas le cas. Même les sujets suscitant l’enthousiasme sont peu nombreux. C’est plus souvent la lassitude ou l’intérêt poli qui domine la presse des années 1964-1968, plutôt que la volonté d’en découdre.

Nous allons d’abord examiner la position de la presse des années 60 vis-à-vis du Journal de la grande guerre et de l’histoire en général, parcourir les rares polémiques mais aussi les sujets fédérateurs pour conclure par l’enjeu éternel de l’histoire télévisée : les jeunes.


6.1) Sensibilité historique du critique de télévision, sensibilité politique du journal

On a finalement très peu de réaction individuelles et politiques au projet. Par contre, la presse s’en donne à cœur joie, directement par le courrier des lecteurs ou indirectement, par la prise de position de ses rédacteurs.

Si on peut comprendre que ceux-ci soient peu enclins à accorder un satisfecit à une série austère qu’ils sont professionnellement obligés de regarder en direct alors qu’on s’amuse ailleurs, leur chronique est souvent le reflet des idées préconçues de leur publication sur la télévision et sur l’histoire. Leurs commentaires sur le Journal de la Grande guerre révèlent à quels symboles historiques tiennent leurs journaux, reflets en tout cas dans cette fin des années 60, d’opinions politiques et philosophiques très tranchées.

D’une façon assez récurrente, la presse politiquement marquée, saisit l’occasion de l’émission pour actualiser ses propos et en tirer des conséquences contemporaines. Par contre, les journaux et magazines plus familiaux et moins partisans comme le Moustique évitent la méthode.

On a d’abord l’impression en lisant la presse d’une presque permanente volée de bois vert à l’encontre du programme mais finalement, on se rend compte que le positif dépasse largement le négatif. Cette apparente contradiction s’explique simplement par le grand nombre d’attaques de détails sur la forme et sur les présentateurs. A l’exemple du Peuple, on confond controverse historique, controverse sur la forme et le réalisateur et peut-être simplement controverse sur la simple existence de l’émission.

Une fois décantées les querelles chafouines, exclu les réserves de forme et les incompréhensions fondamentales, on trouve finalement des prises de positions critiques très classiques

Sans surprise, le Patriote illustré, tout en reconnaissant la qualité de certains épisodes se trouve à la pointe de la critique. Il est particulièrement dérangé par des programmes qu’il conçoit comme portant atteinte à l’image traditionnelle des anciens combattants, voire à la défense du pays. La Métropole n’a pas de discours différent quant elle affirme et regrette en plus que le commentaire ne rate jamais l’occasion d’ironiser sur « Défense de la civilisation occidentale et d’autres slogans éculés de la propagande adverse d’il y a 50 ans ».

Le Patriote illustré accuse parfois sans détour la RTB d’avoir le cœur pacifiste à gauche. A l’inverse, La Cité regrette la trop grande présence de la guerre sur les télévisions belges et étrangères. Le texte mérite d’être cité car il révèle une tendance de la télévision belge du temps : « Depuis plus de 20 ans la guerre n’a pas cessé de désoler quelque coin du monde <…> La presse et la radio se font chaque jour l’écho du désastre et comme si ce n’était pas assez la télévision en rajoute. A la RTB par exemple, outre les films de guerre de la programmation courante et certaines réalisations dramatiques <…>, des séries spécialisées enfoncent le clou à coup redoublés <…> Cette obsession du cauchemar n’est nullement l’apanage de notre télévision nationale, les organismes étrangers vont dans le même sens à tel point qu’on pourrait croire à une action concertée » [11] . Si contrairement au Patriote et à La Métropole, le journal ne se pose pas en défenseur de la nation, ce texte un peu paranoïaque les rejoint en témoignant d’une forme particulière de pacifisme, qui tient un peu de la politique de l’autruche et considère presque la télévision comme responsable de ce qu’elle n’est que le témoin. L’argument sera souvent utilisé dans les milieux catholiques, plutôt à gauche intéressés par la télévision mais dont l’analyse un peu archaïque tient parfois de la politique passée de « patronage ».

Toujours plus à gauche sur l’éventail de la presse belge, La Wallonie attribue à la série un brevet de pacifisme « Nouveaux témoignages accablants contre les bouchers que furent les grands généraux de la Grande guerre (!) [12] . Il n’y a d’ailleurs rien de changé … Et l’émission aura été, une fois de plus, un réquisitoire contre la guerre et on souffrait rétrospectivement, même si c’est à cinquante ans de distance, avec ces hommes que l’on envoyait délibérément à la mort. Le ton de l’émission est et reste fort juste et je me demande jusqu'à quel point les musées militaires et organismes de la ‘grande muette‘ ne regrettent pas de collaborer à cette véritable et heureuse entreprise de démystification » [13] . Il n’est pas sûr que la dernière allusion ait été appréciée par l’équipe, ni pas les Institutions en question.

A la lumière de ces prises de positions autour du pacifisme, on voit bien que chacun regarde le programme avec ses a priori ou ses œillères philosophiques et politiques. La valeur qu’on peut accorder à la critique de télévision en est considérablement réduite car elle n’est qu’une façon de poursuivre dans une autre rubrique la politique du journal. On voit aussi qu’au milieu des années 60, les clivages traditionnels sont encore nettement définis et puisent parfois dans l’histoire, une nouvelle force. Mais la question est de savoir si ces groupes vont s’affronter autour de l’histoire télévisée, s’ils vont l’annexer au profit de leur lutte politique ou si, à part l’un ou l’autre incident, ils s’en moqueront.


6.2)
Polémiques

A un moment où la télévision devient le principal média du pays, la RTB passe pour un « nouvel instituteur » tant dans le fond que dans la forme. Mais cette situation inédite dans la transmission du savoir et de la mémoire, éveille une contradiction entre la version familiale/scolaire traditionnelle de la guerre et celle que donne la série télévisée. C’est de cette contradiction que naissent les rares polémiques autour du Journal de la grande guerre.

Seules une demi-douzaine d’émissions suscitent l’une ou l’autre controverse. Dans une liste à la Prévert, seules celles concernant la flamandisation de l’Université de Gand et dans une moindre mesure le frontisme peuvent avoir une réelle importance.


Flamandisation de l’université de Gand, activisme et frontisme : l’actualité entre par la fenêtre (1966-1968)

Même si le temps qui passe et peut-être la prise conscience que ces activistes avaient de justes revendications, on ne peut pas dire que la flamandisation de l’université de Gand et l’activisme, laissent de bon souvenirs du côté francophone.

En 1966, l’évocation de la flamandisation de l’université de Gand racontée par un des étudiants flamand [14] ne suscite que de molles réactions essentiellement sur le choix malheureux du moment.

En 1967 par contre, les deux émissions sur l’activisme entraînent une réprobation unanime de tous les périodiques francophones. Le Soir est modéré dans ses critiques. Pour lui, on peut essentiellement regretter que l’émission n’ait pas parlé des militants de la cause flamande qui n’entrèrent pas dans ce jeu de l’occupant. Ce n’est pas faux, mais dire que qu’elle est un  plaidoyer de l’activisme et du Conseil des Flandres est exagéré. L’argument est repris par Samedi qui attribue les éventuelles dérives non pas aux journalistes mais aux simples propos du témoin qui occulte que « la population flamande, dans son immense majorité se montra d’un patriotisme intransigeant, rejetant de sa communauté ceux qui flattaient l’occupant ». Le magazine s’indigne pourtant que l’on n’aie pas plus dit que  « la Flandre perdait à ce moment sur les champs de bataille de l’Yser la fleur de sa jeunesse pendant que le Conseil des Flandres trahissait la patrie ». Un cran au dessus dans l’indignation, Le Ligueur accuse la RTB de nier que les partisans du Conseil sont des traîtres et de n’avoir pas nuancé les propos du témoin. Les reproche suivants sont plus graves car les journalistes sont accusés de manquer d’objectivité, de ne pas s’occuper de critique historique et de ne pas avoir instillé dans le reportage une dose de morale expliquant qu’il y a des choses qu’on ne fait pas dans « un pays en guerre occupé, pillé, fusillé » [15] . Enfin, Le Matin plus impliqué encore dans la question [16] , se fait l’écho des critiques épistolaires de ses lecteurs, essentiellement francophones de Flandre, sur « image spécieuse » de l’incivisme : présentation faussée des intellectuels flamands qui auraient accueilli avec faveur les initiatives de l’occupant comme la création de Conseil des Flandres uniquement pour se « libérer du joug fransquillon », ignorance des réticences d’une majorité de la population flamande et de personnalité flamandes, « sévérité dédaigneuse » avec laquelle furent traités les francophones des Flandres considérés implicitement comme la cause de tout le mal « ces bourgeois accrochés à leurs privilèges et qui n’ont rien compris à rien » [17] .

En 1968, l’épisode consacré au Frontisme connaît une destinée mouvementée. Postposé deux fois, la presse crie à l’autocensure. Effectivement Jacques Bredael semble avoir tenu compte de la principale critique faite à propos de l’activiste en rappelant que les activistes n’eurent jamais une large audience populaire  et que le peuple flamand fut dans son immense majorité violemment hostile aux traîtres. Mais ensuite, il raconte sans réprobation la désertion de deux militants frontistes traversant les lignes ennemies pour entrer en contact avec les leaders activistes et  explique leurs principales motivations [18] .

Quelques soit les reproches vrai ou faux, le malaise de la presse francophone devant ces épisode originaux naît du fait qu’il explique en détail les motivations d’un mouvement jusque-là envisagé dans un contexte passionnel ou réprobateur. Dans ces polémiques sur l’activisme ou le Frontisme, c’est le statut d’événements fondateurs du mouvement flamand contemporain qui est en cause. De plus, la tension communautaire qui se développe et qui connaîtra en 1968 un poussée violente, ne contribue sans doute pas à calmer les inquiétudes des contradicteurs de l’émission [19] comme le décrit très bien La Défense sociale : « C’est en juillet 1918 que naît en Flandre un mouvement politique qui tend à obtenir l’autonomie culturelle, administrative et législative d’une partie de la nation belge : la Flandre <…> Tout téléspectateur ayant suivi l’émission 14-18 de lundi dernier n’aura pu s’empêcher d’être frappé par la similitude des situations et la répercussion effective des idées amorcées en 1918. Cinquante ans ont passé, les faits restent identiques, les buts inaltérables, les revendications aussi précises, seuls les hommes ont changé ».

Ces articles sont donc le signe, ténu il est vrai, que du côté francophone l’activisme flamand de la première guerre n’est pas oublié et encore moins accepté. L’actualité linguistique troublée et l’affaire Verbelen [20] qui rappelle la collaboration de l’autre guerre ne facilitent sans doute pas l’apaisement.

Restent alors les polémiques moins sérieuses, voire amusantes :


Le Roi Albert : sensibilité exacerbée (1965)

Le raccourcit malheureux d’un témoin, dans la séquence sur Les Belges assiégés dans Anvers, qui, en évoquant l’ascendance du souverain lâche « le roi Albert était allemand », déclenche l’ire de La Métropole. Seul cette publication, aux propos habituellement très agressif pour 14-18, semble avoir été troublée.


Pâque sanglantes : l’actualité frappe à la porte (1966)

Les rares articles évoquant les Pâques sanglantes reconnaissent l’intérêt d’un tel programme sur un sujet méconnu, bien que la BRT ai diffusé quelques jours auparavant [21] L’Insurrection, un produit de la télévision irlandaise pour leur cinquantième.

Seule La Wallonie, s’y attache vraiment en y allant de son couplet tiers-mondiste habituel en proposant une analyse de la politique impériale britannique du temps : « Les troupes anglaises se signalèrent au monde par une répression sanglante ne faisant pas de différence entre le peuple de la verte Erin, les Boers ou les hindous » et « qu’il n’est certes pas plus agréable d’être sous l’occupation anglaise que sous celles que nous avons connue ». Mais on ne va pas plus loin


Révolution d’octobre : la forme plutôt que la politique (1967)

On pouvait s’attendre à ce que l’évocation de la Révolution d’octobre soulève quelques polémiques entre presse de gauche et presse de droite. En fait, si l’épisode suscite peu d’article, le clivage attendu n’est pas politique mais « esthétique ». Deux journaux de gauche s’opposent sur la forme et particulièrement sur l’usage de la « méthode Mordant ». Michel Franssen et Alain Nayaert en panne d’archives, ont incarné Lénine et Trotski pour raconter la Révolution avec l’aide de Marcel Liebman. Pour La Wallonie « on s’est retrouvé plongé dans l’actualité brûlante car ils y mettent tellement de conviction <…> que pour un peu, on se serait cru en route pour le Palais d’hivers » mais pour Le Peuple ce ne fut qu’un « blabla m’as-tu-vu où la vérité historique de l’événement extraordinairement riche qu’est la Révolution d’octobre a été bafouée, piétinée, rendue insupportable ». Il est savoureux de constater que pour une fois l’organe du parti socialiste à la même opinion que Pourquoi Pas ? pour qui « ils se sont mis à trois lundi à la RTB pour fiche en l’air l’émission <…> ils ont réussi à blablater interminablement  tout en oubliant qu’aucun événement historique n’avait suscité autant de documents d’actualité ».


Cloche merle dans une ville martyre : le sommet de l’insignifiance (1967)

L’épisode consacré aux évasions de la Belgique occupée vers les Pays-bas est l’occasion d’une protestation un peu ridicule de la commune de Dinant. Même si tout le monde reconnaît que l’épisode est « sobre, bien commentée et  illustrée avec recherche » [22] , la ville lui reproche d’avoir glorifié le liégeois Hentjens, capitaine du remorqueur l’Atlas 5 en interviewant sa veuve, sans parler ni interviewer la veuve, dinantaise, du pilote Balbour qui a fait aussi partie de l’expédition. S’ensuit un échange incendiaire entre les deux parties qui trouve un écho disproportionné dans la presse. Le Moustique perfide donne lui une clé édifiante pour comprendre le fond de l’affaire : une petite fille de Charles Balbour a épousé le fils du secrétaire communal de Dinant. C’est sans intérêt mais étonnant quant on pense à ce qu’on aurait pu écrire sur la ville victime, trop rapidement étudiée en 1964.


6.3) L’histoire fédératrice

L’histoire peut parfois devenir fédératrice à l’image des sujets unanimement appréciés :


Résistance à l’occupant, l’aviation, la vie du soldat (1965)

L’évocation d’une héroïne mythique de la résistance à l’occupant (Edith Cavell) peut parfois déboucher sur l’évocation de figures moins connues qui sont mise à l’honneur à l’exemple de Philippe Baucq [23] . Un autre sujet symbolique comme l’importance de l’aviation dans la première guerre peut parfois, par la grâce d’une personnalité comme René Thierry, se transformer en séquence d’anthologie unanimement appréciée près de quarante ans plus tard. Enfin, les programmes sur les offensives meurtrières de Champagne et la vie quotidienne dans les tranchées se taillent un beau succès qu’il faut mettre au crédit de l’idée des auteurs de réunir dans un café un groupe d’anciens combattants dont les souvenirs offrent un tableau vivant mais anecdotique de la vie quotidienne dans les tranchées. Ces souvenirs de jeunesse permettent d’humaniser la série qui se trouve rapprochée du spectateur, peuvent le faire les cartes, explications et archives. Nous avons ici l’une des principales qualités du programme qui utilise abondamment l’interview d’anciens de la guerre, souvent des obscurs [24]


Un pays autour d’un deuil : la Reine Elisabeth (1965)

Mais c’est l’évocation de la Reine Elisabeth dans le programme sur le Service de santé à l’armée belge du 29 novembre 1965 qui suscite les réactions les plus unanimes.

L’émission qui met en avant sa personnalité n’était pas spécialement prévue ce jour là [25] . Mais la mort de la souveraine 6 jours plus tôt [26] oblige la RTB à anticiper sa diffusion à la veille des funérailles [27] .

Même si on peut concevoir que les circonstances rendent la critique difficile, on doit bien constater qu’on n’en trouve aucune dans la presse francophone. Ce n’est plus une Reine qu’on évoque mais une icône. On trouve des phrases telles que : « Hommage émouvant <…> ils s’accordèrent tous pour redire avec une tendresse respectueuse le dévouement de cette Grande dame <…> hymne à la charité et à la générosité <…> infirmière dévouée <…> les blessés au chevet de qui elle se pencha miséricordieusement <…> reine courageuse courant au front comme on court une aventure mettant la main à la pâte humaine avec ce qu’il fallait de gaîté <…> excellente émission sur la Reine infirmière < …> reine des artistes » [28] . Même La Wallonie, qui n’est pourtant pas réputé pour être particulièrement favorable à la monarchie conclu son article sur le Service de santé des armées par « Là aussi, les témoignages furent émouvants et vinrent confirmer ce qu’on savait d’ailleurs déjà : l’épouse d’Albert 1er était une femme exceptionnelle » [29] .

Cette conjonction entre programme historique et évocation du souvenir de la souveraine défunte se situent certainement à mi-chemin entre l’histoire et la légende mais permet au Journal de la grande guerre de produire son épisode le plus apprécié. Notons pourtant que cette émission à succès n’est pas celle qui fait le plus appel à la rigueur historique ou aux faits précis analysés par les historiens, mais bien aux sentiments puisé dans l’imagerie passée du téléspectateur et aussi quelque peu à l’anecdote

Si ces quelques poussées de fièvre occupent beaucoup les chroniqueurs, la question du public de la série les préoccupe également.


7)
Jeunesse, source de toutes les attentions

Le premier anniversaire de la série est l’occasion de s’interroger sur le public du Journal de la Grande guerre. Unanimement, les chroniqueurs identifient deux publics cibles. D’abord les anciens pour qui chaque détail mérite d’être rappelé sans jamais paraître fastidieux. Ensuite, les nouvelles voire les futures génération qui doivent être instruites pour « parer à l’ignorance invraisemblable des jeunes adolescents qui, pour la plupart ne s’y intéressent pas le moins du monde » [30] .

Derrière cette constatation fort logique, un peu fantasmatique mais lucide quand à l’audience, se profile un enjeu moral permanent pour ceux qui réalisent, conçoivent, commandent ou commentent l’histoire à la télévision : on réalise des émissions sur les deux conflits avec en ligne de mire deux populations cibles avouées, sinon alibi : les anciens et les jeunes générations sensées être ignorantes des évènements.

14-18 n’échappe pas à cette préoccupation récurrente des diverses autorités morales ou formelles. Que se soit par alibi ou crainte, du professeur au politique, du journaliste au directeur de chaîne, tous s’inquiète de la façon dont les jeunes générations peuvent percevoir les programmes historiques [31] .

Le milieu des années 60 est aussi une période où trois générations aux valeurs fort différentes vont cohabiter. Ce tournant de la mémoire est bien remarqué à l’image de l’introspection relativiste du chroniqueur du Ligueur : « Ce qu’évoque l’ancien combattant et qui est pour moi de l’histoire, et pour mes fils presque de la préhistoire, reste pour lui de la vie, et les cinquante ans qui ont passé n’ont pas pour lui la même épaisseur que pour moi » [32] .

En gros les anciens de 14-18 sont largement septuagénaires. Leurs enfants, par exemple les rédacteurs de ces articles, ont autour de 40-50 ans. S’ils ont vécu consciemment le second conflit ils ne connaissent la première guerre que par leurs parents. Leurs petits enfants, les jeunes mythiques auquel chacun pense, n’en ont bien sûr vécu aucun. Ils sont tributaires des souvenirs familiaux, de l’école qui n’est pas pour eux d’un grand secours et des éventuels programmes télévisés. Se trouvent donc, face à face, une version familiale et une version télévisée des conflits. Les polémiques autour de la Grande guerre naissent certainement de cette opposition.

Cette rupture entre les génération, peut surgir où on l’attend le moins et prend parfois des chemins détournées et glissants. A l’occasion d’un programme sur les Mutineries de 1917, la presse (de La Wallonie à La Cité) relaie des protestations d’anciens qui reprochent parfois violemment au programme la jeunesse de ses journalistes, en oubliant d’ailleurs qu’ils avaient leur âge en 1914 [33] .

Mais au delà de cette critique de forme assez peu sérieuse, ils vont plus loin en niant presque le droit pour les non anciens de parler de leur expérience, à l’image du texte justifiant leur plainte [34] au Ministre de la culture française Pierre Wigny, relayée par le Sénateur Lahaye : « C’est le tact avant tout qui manque à ces jeunes Eliacin, en se mettant impudemment et à la petite quinzaine, à la place de ceux qui ont effectivement fait la guerre et en transposant leurs propres appréciations de 1967 en sentiments de combattants de 1914 ou de 1917. C’est une opération insoutenable pour l’auditeur qui a fait la guerre <…> et qui, même s’il accepte sereinement qu’on lui révèle le dessous des cartes diplomatique, ne peut admettre qu’on lui prête, à lui, des motivations intimes qui n’étaient pas les siennes <…> Non, les anciens de 1914-1918 n’ont que faire des pitreries de ce genre, aussi la plupart d’entre nous ont depuis longtemps décidé de tourner le bouton aux premiers sons du générique annonçant le début d’une émission dont ils espéraient tant » [35] . Parfois la colère prend des proportions outrancière quant-ils envisagent un éventuel programme sur la seconde guerre et la déportation : « Il faut espérer que ce jour-là, des mesures soient prises pour assurer le respect de la dignité des résistants et des concentrationnaires ou qu’à défaut de ces mesures nous soyons encore capable d’organiser un petit commando punitif qui prendra les mesures nécessaires » [36] .

Mais il faut relativiser la portée d’affirmation complaisamment relayée par des chroniqueurs qui aiment peu la télévision et particulièrement la RTB. Elles ont peu effets. Elles résultent plus de la mauvaise humeur d’un groupe d’ancien un peu désabusés par l’évolution du monde, qui se sent dépossédé d’une identité vieille d’un demi-siècle, par une émission qui a tendance a désacraliser la première guerre. On verra que 15 ans plus tard les anciens de la seconde guerre reprendront la contestation dans des termes semblables à propos de L’Ordre nouveau de Maurice De Wilde.


8) France – Belgique : deux choix de programmation


8.1) L’influence de l’historiographie française en Belgique

Le Journal de la Grande guerre permet également de déceler qu’elle peut être l’influence de l’historiographie française en Belgique. Le cas du programme du 3 juillet 1967 sur les mutineries de 1917 et leur répression dans les armées française est intéressant.

La presse en parle comme d’un sujet brûlant entre tous « traité avec beaucoup de tact [comme] un sujet délicat ». Or, la Belgique est peu concernée par ces évènements et leur souvenir. Rappelons par exemple que notre pays fut un havre pour les frontaliers français voulant voir Les Sentiers de la gloire interdit chez eux.

Mais, plus que le fond du programme, c’est la forme utilisée qui choque les critiques. Ils regrettent le choix d’avoir expliqué les mutineries par un dialogue entre les deux présentateurs, l’un se faisant l’avocat du haut commandant, l’autre de l’opinion anti-militariste.


8.2) Verdun RTB – Verdun ORTF 

Au-delà des variétés et des fictions, la concurrence des programmes français touche pour une fois les programmes historiques à l’occasion des émissions sur Verdun.

Les deux télévisions envisagent de retracer la prise du fort de Douaumont en 1916. La RTB,  qui aujourd’hui s’en enorgueilli sans d’ailleurs rappeler l’incident, avaient déniché à Hambourg le lieutenant allemand von Brandits qui, un peu par hasard et dans un quiproquo presque comique, avait avec quelques hommes pris le fort de Douaumont. [37] Malheureusement, ce beau coup va être bêtement gâché. Les français qui avaient également une interview de von Brandits, la diffuse exactement à la date anniversaire tandis que la RTB respecte son planning et est grillée d’une semaine.

Pour une fois, à l’occasion de deux programmes semblables, on voit clairement que les deux télévisions sont franchement concurrentielles et cela sans attendre les années 80.

L’autre avantage pour nous de la diffusion parallèle des Verdun français et belge est qu’elle permet par l’étude de la presse de saisir quelle formule à la préférence du public. Il semble que le système belge qui tend à une certaine exhaustivité ait la préférence au single shot français qui privilégie l’intelligibilité immédiate. Certains se demandent également à qui finalement s’adresse ce genre de programme. A défaut d’être complète et scientifique, la réponse est à la fois logique et fantasmatique. Elle est appréciée par ceux qui ont participé à la Grande guerre, par les veuves, les orphelins des soldats qui la vécurent. Elle est utile pour parer à l’ignorance invraisemblable des jeunes adolescents qui, pour la plupart ne s’y intéressent pas le moins du monde. Remarquons à cette occasion une constante de notre travail. La majorité des commentaires sur les programmes historiques étudiants les deux conflits sont de ce type et nous permettent de déterminer les deux populations cibles avouées, sinon « alibi » : les anciens et les jeunes générations sensées être ignorantes des évènements.

Enfin, on oppose étrangement la participation des hommes à la guerre au récit de celle-ci, mais un récit où l’histoire cède le pas à l’hagiographie.

A la mi chemin de la série, on se demande si, lassés, les rédacteur de tous ces articles ne préfèrent pas un Guillemin qui raconte de belles histoire à un programmes qui s’efforce avec ses défaut de raconter l’histoire. On voit bien qu’un programme aussi long et varié ne peut satisfaire tout le monde et qu’il ennuie malgré qualités et inventions 


8.3) Histoire télévisée française, histoire télévisée belge

On aussi peut souligner la différence dans la manière d’aborder les anniversaire s par deux émissions historiques phares des années 60. En Belgique 14-18, le journal de la Grande guerre consacre 61% de ses émissions à l’analyse d’événements ponctuels mais anniversaire s du mois de diffusion. Les autres sont au moins « dans l’air du temps » du semestre anniversaire. Par contre La Caméra explore le temps flambeau de la première chaîne française à la même époque, consacre seulement 10% de ses émissions à l’anniversaire d’événements historiques (et encore sauf exception, ces anniversaires sont aussi étranges que 160 ans, 2 10 ans).

Cette différence dans la manière d’envisager l’émission historique peut s’expliquer, au delà du goût du réalisateur et de la volonté d’attirer le chaland par une date symbolique, par la conception même de l’émission, ou mieux encore par le choix de la période étudiée.  La télévision a besoin d’images pour monter son spectacle, fut-il historique. Tous ceux qui voudront s’essayer au genre devront pour rendre vivantes  leurs créations monter un document sur un thème dont on dispose d’images. Dans les années 50-60 on a recourt à la dramatique, plus tard au montage d’archives, ce qui explique d’ailleurs pourquoi l’histoire contemporaine et part iculièrement le 20ème siècle se taille la part du lion parmi les émissions historiques à la télévision .

En fait, dans la forme La Camera explore le temps reconstitue et 14-18  met en scène. Mais avec des monteurs comme Rossif ou Turenne, la France va bientôt produire des montages fort semblables qui, sans atteindre la longueur de 14-18, atteignent l’idéal du genre dans Les Grandes batailles.


9) La postérité du Journal de la Grande guerre


9.1) Le souvenir du Journal de la Grande guerre

En 1968, la presse, qui n’a pourtant pas économisé ses critiques pendant quatre ans,   va dresser un bilan plutôt positif de la série. Si 14-18 est parfois inégale, irritante ou passionnante les acquis dominent : usage plus intéressant des témoignages et non pas les longues digressions historiques, usage d’une grande diversité dans les moyens de présentation (successivement ou parfois simultanément  reconstitution d’un journal télévisé d’époque, de monographie traitant des évènements et de sujets thématiques) pour éveiller l’intérêt et la curiosité du public, usage d’un grand nombre de sources variées, privilégie l’anecdote, le témoignages et la vérité humaine au détriment des synthèses schématiques. Elle souligne également que l’intérêt du public n’a jamais fléchi de façon significative, que l’émission a toujours pu être maintenue à l’heure de la plus grande audience, qu’elle fut un écolage rigoureux de l’antenne pour les nouveaux, un exercice de style pour les plus anciens et une occasion de mettre au point des équipes et des techniques de narration qui pourront s’appliquer à des futures émissions de l’histoire.

Une quinzaine d’année plus tard, la RTB la célèbre déjà comme sa première grande série d’émissions historiques et la fait rentrer dans le panthéon de la chaîne.

Son souvenir est tellement prégnant que le Journal de la grande guerre va même jusqu’à gommer le souvenir toutes productions antérieures. Il devient le symbole du début de l’histoire à la RTB, ce qui est faux. Son aspect marathonien minimise également fortement, même chez des journalistes fort impliqués dans la production historique contemporaine, la grande production postérieure de la chaîne, qui ne trouve pas sa place dans les séries ambitieuses comme le sera Jours de Guerre. En fait, même si 14-18 et Jours de guerre sont les seules séries d’une telle ampleur et d’une telle ambition, dire qu’après la diffusion du Journal de la Grande guerre « la situation semble se figer jusqu’à la réapparition dans les années 90 de la formule » est insuffisante. Les 20 ans qui vont suivre seront à la RTB d’une extrême richesse historique même si les programmes ne sont pas organisés en séries de longue haleine.

Curieusement, si on évoque souvent 14-18, il existe peu de synthèse sur l’émission à part l’une ou l’autre courte introspection souvent « d’origine RTB ». Par contre, les émissions commémoratives se multiplient : 14-18. Journal de la Grande guerre dans Télé Rétro en 1979, 14-18. 70ème anniversaire un extrait du programme du 2/9/68 et  l’extrait de l’interview de Jean Guehenno en 1984, A la mémoire de 14-18 en 1994 et Histoire : sur les traces de 14-18 dans Archives en 2003 qui reprend le premier épisode de la précédente.

Mais, au delà d’un souvenir nostalgique, c’est dans ce qu ‘elle a laissé à l’historiographie télévisée belge qu’il faut trouver la plus belle postérité de 14-18.


9.2) La prise de conscience d’une particularité histriographique

L’aboutissement de séries de grande envergure suscite des interrogations dans les équipes de réalisation et de direction. Faut-il poursuivre sur le succès initial en profitant de l’équipe réunie et de l’existence d’un public potentiel ou « limiter les frais » en redistribuant les équipes et les moyens vers d’autres projets.

Logiquement, c’est la BBC qui s’interroge la première. Fin 1964 déjà, elle annonce qu’elle prépare une suite à La Grande guerre qui vient de se terminer. Le projet est confié au même auteur, Tonny Essex qui produit en 1966 la série en 13 épisodes The Lost peace. Englobant la période qui s’étend de 1918 à 1933, le titre fait référence au livre La faillite de la paix de l’historien français Maurice Beaumont.

La télévision belge vit également les mêmes questionnements en 1967, longueur de la série oblige. A la lumière de l’expérience du Journal de la Grande guerre, elle organise une conférence professionnelle intitulée Télévision et histoire. Elle réuni réalisateurs, journalistes et historiens dont Jean Stengers (ULB), Raymond Rifflet (Centre universitaire d’Anvers), Henri Bernard (ERM), Georges Goriely (ULB), Van Swieten (Centre universitaire de Mons)

Après l’introduction de Robert Wangermée, on y diffuse une sélection d’extraits de programmes historiques du moment : le 14-18 belge, La Grande guerre anglaise, trois séquences du Notre siècle du réalisateur Hongrois Peter Bokor, et un extrait du Roi Pahaut.

La discussion qui suit est remarquable car elle dresse un inventaire presque exhaustif des problèmes et questions que peuvent susciter un programme historique télévisé : difficulté liées à la recherche des informations de base (documentation générale, sonore, iconographique et filmée), difficulté d’établir un équilibre entre raisonnement historique et nécessité du spectacle télévisé, difficulté d’insérer judicieusement documents et faits historiques dans une trame dramatique, question de la collaboration plus ou moins conflictuelle entre historien et journaliste, interrogation sur la fonction du journaliste–présentateur présenté comme médiateur entre le document et le spectateur.

Mais, cette conférence est surtout le symbole de la prise de conscience par la télévision que le montage historique, sur un sujet belge lié aux deux conflits mondiaux, est un genre qui trouve naturellement sa place dans ses grands classiques. Les intentions de poursuivre et systématiser l’expérience sont clairement expliquées. On envisage la préparation d’une série ultérieure qui porterait sur la période de l’entre-deux-guerres et dont la réalisation se ferait à partir de l’expérience acquise.

Elle consacre la collaboration avec les historiens professionnels, non seulement pour la collecte de la documentation générale, le dépouillement et la recherche de première main mais également en ce qui concerne la réalisation des interviews de nombreux témoins. On verra souvent dans ces futures émissions les historiens présents à la conférence et plus tard la génération de ceux qui gravitent autour du Centre de recherche et d’étude historique de la seconde guerre mondiale.

Elle dresse également un véritable cahier des charges pour les futurs programmes d’histoire contemporaine à la RTB : 18 ou 20 émissions échelonnées sur trois ans, émissions synthétiques traitant des grands thèmes de la période 1918-1940, illustration d’évènements survenus à l’étranger uniquement dans la mesure où ils ont eu des répercutions sur la vie des belges, travail agencé de façon à pouvoir répondre aux préoccupations de l’homme d’aujourd’hui pour « ne pas faire de l’histoire pure et désincarnée ». On trouve donc ici les germes de L’entre-deux-guerres mais moins certainement de 25 ans après, car le projet s’arrête prudemment à 1940.

Contrairement à la France, après une série marquante, la Belgique a mené une réflexion fondatrice d’une école historique télévisée. Jusqu’aux années 90, elle en respecte les grandes lignes : étude des années 1930-1945, priorité à la Belgique en propre ou à travers l’histoire de ses puissants voisins, intérêt pour des sujets assez spectaculaires ou qui touchent encore le spectateur, collaboration sous formes diverses avec les universités et les centres de recherche de la mise en image de leurs travaux à l’apparition du professeur sur les écrans, mise au point d’une forme classique (montage de documents + témoins + journaliste/historien in situ) mais dramatisée. Histoire contemporaine, histoire belge et série sont donc les concepts clés de l’histoire à la RTB et c’est à 14-18. Le Journal de la grande guerre qu’elle le doit.

Au delà de son importance dans la réflexion théorique, il faut bien avouer que pratiquement 14-18 et conférence professionnelles ont eu une influence modérée sur la suite. Si méthode et thématique sont précisées et respectées, on n’abouti pas à la création d’une véritable équipe histoire à la RTB. C’est toujours le goût de certains réalisateurs et journalistes pour l’histoire qui va les amener à réaliser des programmes historiques.

En fait, l’équipe histoire est essentiellement composée de Jacques Cogniaux, d’Ariane Brunfaut sa secrétaire et souvent de Philippe Dasnoy qui d’ailleurs est le responsable en titre « des émissions historiques à la télévision » en 1971-1972 mais qui laisse une grande latitude à son réalisateur. Il se consacre presque exclusivement aux émissions historiques et, par habitude, tout le monde accepte à la RTB d’institutionnaliser cette petite équipe mais en se gardant de l’officialiser.


10) Conclusions

Que peut-on retenir de cette longue série :


10.1)
Le regard de la télévision

La télévision se rend compte de l’intérêt spectaculaire des programmes historiques de montage. Moins chers et plus facile à réaliser que les dramatiques, ils se prêtent bien à la dramatisation télévisée car ils permettent de mélanger, sur un commentaire in ou off, des sources visuelles nombreuses : mise en situation, paysages, interviews, tableaux photographies ou mieux images animées. C'est sans doute pourquoi, l’histoire contemporaine et part iculièrement le 20ème siècle se taille la part du lion parmi les émissions historiques à la télévision.

La télévision a besoin d’images pour monter son spectacle, fut-il historique. Tous ceux qui voudront s’essayer au genre devront pour rendre vivantes  leurs créations monter un document sur un thème dont on dispose d’images. Dans les années 50-60 on a recourt à la dramatique, plus tard au montage d’archives, ce qui explique d’ailleurs pourquoi

 

10.2) L’histoire à la RTB

14-18 lance pour plus de trente ans l’habitude de produire des émissions télévisées à la RTB, tout en validant l’habitude d’user et d’abuser des prétextes anniversaires.

On assiste aussi ici à la création d’un véritable pool historique efficace et organisé tel que celui de la BBC. Malheureusement, comme pour Jours de guerre plus tard,  il ne sera pas exploité à la hauteur de ses capacités après la clôture de la série. Jusqu’en 1989, il n’y a plus d’équipe histoire réellement structurée à la RTB, même si des individualités brillantes reprennent la tâche.

La série permet à la RTB de s’interroger sur le sens qu’elle veut donner à l’histoire télévisée et surtout de dresser un cahier des charges pour les futurs programmes : nécessité d’établir un équilibre entre raisonnement historique et exigence du spectacle télévisé, nécessité de soigner l’insertion judicieuse des documents et des faits historiques dans une trame dramatique, nécessité de collaborer avec les historiens, interrogation sur la fonction du journaliste–présentateur présenté comme médiateur entre le document et le spectateur .

14-18 prouve aussi que le montage historique, sur un sujet belge lié aux deux conflits mondiaux, est un genre qui trouve naturellement sa place dans ses grilles horaires. Pendant 25 ans Michel Franssen, Jacques Cogniaux et quelques autres vont s’en repaître en produisant des programmes aux caractéristiques identiques : étude des années 1930-1945, priorité à la Belgique en propre ou à travers l’histoire de ses puissants voisins, intérêt pour des sujets assez spectaculaires ou qui touchent encore le spectateur, collaboration sous formes diverses avec les universités et les centres de recherche de la mise en image de leurs travaux à l’apparition du professeur sur les écrans, mise au point d’une forme classique (montage de documents + témoins + journaliste/historien in situ) mais dramatisée. Histoire contemporaine, histoire belge et série sont donc les concepts clés de l’histoire à la RTB et c’est à 14-18. Le Journal de la grande guerre qu’elle le doit.

Même si, aujourd’hui encore, on ne sait pas répondre à la simple question de savoir qui doit avoir le dernier mot dans la réalisation d’une émission historique à la télévision (l’historien et la rigueur de sa méthode ou le réalisateur qui doit faire un spectacle qui plait). La série consacre la collaboration avec les historiens professionnels, non seulement pour la collecte de la documentation générale, le dépouillement et la recherche de première main mais également en ce qui concerne la réalisation des interviews de nombreux témoins.


10.3)
Historiographie générale

Paradoxalement, le triomphe de la série sur la première guerre signe également la quasi disparition de la période à la télévision belge. C’est la deuxième guerre qui sera au centre des préoccupations historiques de la chaîne dans les années 69 - 95, de 25 ans après à Jours de guerre. La première guerre revient plus fréquemment sur les écrans à partir du milieu des années 90 mais souvent par l’intermédiaire de programmes français. Cette mutation de l’historiographie télévisée est parallèle à la mutation de l’historiographie générale (Historial de la grande guette à Péronne // Moissons de fer -  In Flanders Field Museum à Ypres // goût pour la 1GM à la BRT)

Le Journal de la Grande guerre n’a pas révolutionné l’historiographie générale à l’exception peut-être de la sauvegarde des témoignages, humainement passionnants mais souvent de seconds couteaux. En effet, l’émission ne suscite pas de publications particulières mais est le reflet des travaux des historiens et des publications du temps qu’elle utilise abondamment.

Même s’ils reprochent aux auteurs d’abuser des reconstitutions, des mises en situation et de ne pas hésiter à faire passer des films de fiction pour des documents d’archives, les historiens professionnels sortent gagnant de la série. Ils passent rapidement du statut d’auteur de livre (plus ou moins populaires) à celui d’acteurs au sens propre. Ils apparaissent dans les programmes, acquièrent une notoriété et deviennent des vedettes de l’histoire télévisée (Bernard, Goriely, Stengers)


10.4)
La forme et les gens

14-18 est le triomphe de l’application à l’histoire de la « méthode Mordant » que le journaliste avait inventée dans la série Wallonie. Elle mélange une insolence certaine, un goût pour la rigueur des sources, un talent d’acteur, une didactique intelligente et un sens certain du spectacle. Pour ces trois derniers point, je me permet dans un scandaleux anachronisme de les comparer avec l’inventivité de C’est pas sorcier.

La forme choisie est un choix dans l’air du temps. La série abandonne la reconstitution dramatique pour la dramatisation des scénarios. Comme l’avait fait peu avant la BBC et comme le fera la France quelques années plus tard, la RTB choisi d’abandonner la reconstitution dramatique pour la mise en scène des images d’archives

Le système belge tend également à une certaine exhaustivité et, s’oppose au choix français du single shot qui privilégie ici l’intelligibilité immédiate. Dans un premier temps, le public semble apprécier ce choix mais à la longue, se demande si, un Guillemin qui raconte de belles histoire n’est pas préférable à un programmes qui s’efforce avec ses défaut de raconter l’histoire.

14-18 est le terrain d’entraînement d’une génération de jeunes journalistes et réalisateurs, aujourd’hui disparus des écrans, qui appliquent à l’histoire, avec une inventivité innocente, les méthodes du reportage d’actualités. Elle est à la source de ce qu’on peu appeler « l’école belge du documentaire historique télévisé » et je me demande si ce n’est pas le principal acquis de la série.

 



Notes


[1] Environ 250

[2] 24 programmes sur la première guerre et 22 programmes sur la seconde guerre

[3] En France, les fusillés pour l’exemple. En Belgique, le mouvement flamand dans les tranchées et les collaborateurs du Conseil des Flandres (Le Journal de la Grande Guerre ne  fera pas l’impasse sur ceux-ci, et les étudiera plus tard, 50 ans après)

[4] Pour la France par exemple. Pour la première guerre : un agresseur s’en prend à une puissances neutres avant d’attaquer le territoire national ; les dures opérations militaires classiques à l’ouest pendant quelques mois sont suivies de longues années d’un front stabilisé tout aussi dures ; les populations sont unanimes contre l’envahisseur, les institutions et le système politique sont préservée. L’étude de la seconde guerre, implique par contre l’évocation d’une guerre civile et la disparition de l’influence française dans le monde

[5] 26ème semaine de guerre (RTB - 8/2/65)

[6] Rapport annuel. Exercice 1964, Bruxelles, RTB, [1965], p. 43

[7] reprise en direct du programme en Eurovision Cérémonies commémoratives à Utah Beach, intégration dans Neuf millions de la séquence Le 6 juin 1944 ; réalisation du double programme Il y a 20 ans la libération de la Belgique ; reprise de la  Commémoration de la Bataille des Ardennes, achat des programme américain Il y a 20 ans l’offensive de la dernière chance et Champs de bataille

[8] TELAMAQUE, [Grande mangeuse d’homme] dans La Dernière heure, Bruxelles, 17 février 1967.

[9] [A 14-18] dans Télé-Magazine, 25 mai 1968

[10] Léon THOORENS, [14-18 a repris du souffle] dans Le Ligueur, Bruxelles, 10 mai 1968

[11] La Guerre au petit écran ou l’obsession du cauchemar dans La Cité, Bruxelles, 23 décembre 1965.

[12] Germinal n’a pas d’autres propos : « 14-18 a rarement atteint ce degré d’amertume quand il nous montre à travers les déclarations des quelques rescapés des offensives de Champagne combien elles ont été meurtrières et inutiles. Nous nous souvenons d’une phrase du Crapouillot dénonçant les hécatombes de soldats, faisant monter au firmament les étoiles des généraux »

* Germinal, 15 octobre 1965

[13] Réquisitoire permanent dans La Wallonie, Liège, 13 octobre 1965

[14] Firmin Mortier

[15] Léon THOORENS, [14-18 est une curieuse émission] dans Le Ligueur, Bruxelles, 10 mars 1967

[16] car  l’un des trois représentant de la presse quotidienne en Flandre avec La Flandre Libérale et La Métropole. Le journal est bien conscient que la flamandisation signera à plus ou moins long terme sa disparition comme le laisse déjà présager la baisse constante du nombre de ses lecteurs. Le Matin fait partie du groupe Rossel, est surtout lu dans les milieux d’affaire, n’est lu que par des francophones de Flandre, a un contenu rédactionnel semblable aux deux autres titres. Le Matin, La Métropole et La Flandre libérale ne tirent qu’a 14300 exemplaires en 1970 (à titre de comparaison, les tirages sont au même moment d’approximativement  278000 pour Le Soir, 153000 pour La Libre Belgique, 90000 pour les journaux du groupe Vers l’Avenir, 33000 pour La Cité et 111000 pour l’hebdomadaire Télé Moustique)

[17] HVN, Comment on éclaire l’histoire dans Le Matin, Anvers, 7 avril 1967.

[18] facteurs psychologiques expliquant la genèse de la création du Frontparteit, déséquilibre et incompréhension entre la troupe majoritairement flamande et les officiers majoritairement francophones et réponses timorées aux problèmes issus de cette situation

[19] L’auteur de l’article en est conscient car, après avoir loué la RTB malgré les critiques précédentes, il le termine par « En revanche, nous sommes habitués depuis des mois à l’esprit véritablement haineux qui anime la télévision néerlandaise [la BRT] en matière linguistique ».

[20] Robert-Jan Verbelen, un ancien membre du Veiligheidskorps de la De Vlag, condamné à mort par contumace en 1947 par une chambre flamande du Conseil de guerre et réfugié en Autriche est acquitté en 1965 par un tribunal viennois qui estime qu’il n’avait fait qu’obéir aux ordres. En fait le dossier trop peu documenté fourni par la Belgique joint à l’émotion du refus d’extradition et de l’acquittement eut au moins l’avantage de montrer la nécessité de créer en Belgique un centre de documentation sur la Seconde guerre semblable à ce qu’il existait en France et aux Pays-bas, ce qui fut fait en décembre 1967 par la création du Centre de recherche et d’études historique de la Seconde guerre mondiale - La Pensée et les hommes consacre début janvier 1966 un épisode à l’affaire

[21] L’Insurrection (BRT – 8/4/66) et L’Irlande dans 14/18 (RTB – 23/5/66)

[22] [Nous sommes en 1917] dans Samedi, 28 janvier 1967

[23] « A 14-18 démystifications d’Edith Cavell et juste hommage à  Philippe Baucq ? Le plus résistant à  la torture, à l’interrogatoire, c’était lui ». Le programme propose une interview de la fille de Philippe Baucq et celle d’une écrivain anglais auteur « d’un livre sur Edith Cavell »  qui « déclare en toute sérénité et objectivité [qu’elle] avait sans doute ignoré en partie les dangers  qu’elle courrait et qu’il était juste de la part des Allemands de la punir »

* La Libre Belgique, Bruxelles, 28 octobre 1965 – Bon chapitre sur la Grande guerre dans La Gazette de Liège, Liège, 27 octobre 1965

[24] Voir la liste dans la notice 14-18. Le Journal de la Grande guerre

[25] « Les auteurs de 14-18 ont eu l’excellent réflexe de programmer cette semaine, l’émission qu’ils préparaient sans doute de longue date mais durent néanmoins hâter un peu, sur l’action de la reine Elisabeth pendant la guerre et tout spécialement à l’hôpital l’Océan de La Panne »

* Le Ligueur, Bruxelles, 9 décembre 1965.

[26] 23 novembre 1965

[27] « La Reine y était présentée sans trémolo dans la voix, sans ce ton faussement  ému que tous ont crû devoir employer pour parler d’une femme qui a toujours préféré la simplicité aux protocoles et salamalecs. Jamais un tel hommage n’avait été rendu à Elisabeth. Le lendemain d’ailleurs, pour meubler des temps morts de l’émission [funérailles] entre Saint-Michel et Laeken, sur des images du ciel gris de Bruxelles, nous ne fûmes pas tellement surpris  de réentendre les passages les plus pittoresques de l’émission de la veille ».

* Germinal, 3 décembre 1965.

[28] La Gazette de Liège, Liège, 1er décembre 1965 – Le Patriote illustré, Bruxelles, 1er décembre 1965 – La Libre Belgique, Bruxelles, 2 décembre 1965 – Germinal, 3 décembre 1965 – La Cité, 3 décembre 1965 – Samedi, 11 décembre 1965.

[29] La Wallonie, Liège, 1er décembre 1912

[30] Jacques LAURENT, Glaneurs – [L’ORTF vient de diffuser une émission] dans Télépro, Verviers, 10 mars 1966

[31] Pour les jeunes comme enjeu d’un programme plus récent voir Jocelyn GREGOIRE, L’Attitude des jeunes téléspectateurs face à l’Ordre nouveau dans Bulletin trimestriel de la Fondation Auschwitz, Bruxelles, Fondation Auschwitz, décembre 1987 – février 1988, n° 16, pp. 33-46.

[32] [Les auteurs de 14-18] dans Le Ligueur, Bruxelles, 9 décembre 1965.

[33] Théo ALEXANDRE, [Entre les deux il y avait] dans La Wallonie, Liège, 19 juillet 1967 - Théo ALEXANDRE, [14-18 continuait sa petite gue-guerre] dans La Wallonie, Liège, 6 décembre 1967 - [Un sénateur a signalé au ministre de la culture] dans La Cité, Bruxelles, 21 août 1967

[34] qui n’aboutira à rien, le Ministre ayant répondu « que les renseignements nécessaires ont été demandés » ... à la RTB

[35] La RTB et l’histoire de la Guerre 14-18 dans Bulletin d’information des prisonniers politiques, résistants et combattants , 28 août 1967.

[36] La RTB et l’histoire de la Guerre 1-18, op. cit.

[37] le fort, presque démilitarisé, est pris le 25 février 1916 et est repris par les français après un dur bombardement d’artillerie le 24 octobre 1916 – On peut voir le court métrage Douaumont repris  (15’) diffusé sur Histoire le 15/11/99 [VJG – 4126]